- by Jérémy Felkowski
- 26 juin 2025
- Cuisines
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La blanquette de veau, du temps et de la douceur
Tradition oblige, l’approche de l’hiver rime avec le retour de la blanquette de veau. Savoureuse et onctueuse, c’est sans doute la reine de toutes les recettes populaires à la française. Mais sa préparation réclame du temps et de l’attention.
La blanquette est un monument. Un plat à part, symbole d’une France mijotée, patiente et précise. Rien n’y est brusque, tout s’y joue dans la douceur : la lenteur du feu, la tendresse de la viande, le velours d’une sauce pâle qu’un trait de citron vient réveiller. Préparer une blanquette, c’est apprendre à respecter le temps et la matière. C’est accepter de cuisiner sans hâte, en laissant la cuisine se remplir d’un parfum de beurre et de vin blanc.
Étape 1 Le choix, première promesse.
Tout commence par la viande. Une bonne blanquette ne souffre pas de compromis : on choisit un veau de qualité, jeune, élevé au lait ou sous la mère. Le collier, l’épaule ou le tendron sont les morceaux rois , riches en fibres fines et en gélatine naturelle, garants d’une texture moelleuse. Dans une cocotte, on fait fondre un peu de beurre doux et on fait revenir la viande, juste assez pour la colorer légèrement. Ce doré discret, c’est le goût à venir.
Étape 2 Le roux, le lien du plat.
Quand la viande commence à chanter, on saupoudre deux cuillères de farine. On mélange aussitôt : la farine enrobe la chair, capture le jus. C’est elle qui, plus tard, donnera à la sauce son épaisseur soyeuse. Le geste est simple mais essentiel, presque silencieux.
Étape 3 Le bouillon et le vin.
On ajoute ensuite deux ou trois verres d’eau, un trait de vin blanc sec, et les cubes de bouillon. On remue doucement, on complète d’eau jusqu’à recouvrir la viande. À ce stade, le plat prend vie. Le liquide bouillonne à peine, le beurre et le vin se marient.
Étape 4 Les compagnons du mijoté.
Carottes en rondelles, oignons émincés, champignons frais : chacun apporte sa note. La carotte pour la douceur, l’oignon pour la profondeur, le champignon pour sa légère âcreté boisée. On couvre, on baisse le feu, et on laisse mijoter longtemps, très longtemps , au moins une heure et demie, parfois deux. Le bouillon devient crème, la viande s’attendrit jusqu’à se défaire à la cuillère. Si le liquide baisse trop, on rajoute un peu d’eau, toujours chaude.
Étape 5 La touche finale, l’élégance.
Quand la viande est prête, on prépare le secret de la blanquette : un mélange de crème fraîche, de jaune d’œuf et de jus de citron. On le verse hors du feu, à la toute fin, pour ne pas cuire l’œuf. Ce geste crée une sauce d’un blanc nacré, douce, équilibrée, que le citron réveille d’une acidité juste.
La blanquette se sert brûlante, nappée, avec un riz nature qui absorbe le jus. C’est un plat de patience et de générosité, un hommage à la lenteur. Tout y est affaire d’équilibre : la richesse de la crème, la légèreté du citron, la noblesse d’une viande choisie avec soin. Dans chaque bouchée, il y a la France du dimanche, la maison qui respire, et ce bonheur simple : celui de cuisiner avec le temps.