- by Jérémy Felkowski
- 16 octobre 2025
- Portraits
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Arnaud Viel, chef et entrepreneur dans l'âme
C’est dans une maison de pierre discrète, aux volets sages, que se joue depuis plus de deux décennies une partition culinaire parmi les plus attachantes de Normandie. À Argentan, chef-lieu paisible de l’Orne, Arnaud Viel mène avec constance et sincérité une cuisine de cœur, enracinée dans son territoire mais ouverte au monde, au sein de son restaurant La Renaissance.
Né à Alençon, Arnaud Viel est d’abord un enfant du pays. Mais il serait réducteur de le cantonner à l’image rassurante du « chef local » ; sa trajectoire est celle d’un homme qui a choisi de revenir sur ses terres pour les magnifier, après avoir sillonné d’autres tables et d’autres paysages. Il n’est pas question ici de folklore gastronomique, mais bien d’un engagement profond, quasi militant, pour révéler les richesses normandes sans les figer dans une carte postale.
Dans l’assiette, cela se traduit par un équilibre subtil entre tradition et mouvement. Chez lui, le terroir n’est jamais une contrainte mais un point de départ. La volaille de la ferme voisine, le lait cru, les céréales anciennes ou les champignons glanés dans les sous-bois ornais sont traités avec une précision moderne, une légèreté presque pudique. Sa fameuse trilogie autour de la pomme, acidulée et boisée, convoque ainsi à la fois la mémoire d’une tarte rustique et le raffinement d’un dessert de haute volée. À La Renaissance, on mange la Normandie, mais autrement.
Une approche très personnelle
Le style d’Arnaud Viel tient d’ailleurs tout entier dans cette capacité à moderniser sans brutaliser. Ses plats racontent des histoires connues, mais dans une langue nouvelle. Un foie gras de canard s’associe à une gelée de cidre brut infusée au thym citron ; un sablé au sarrasin se pare d’un crémeux de camembert réinventé. Le geste est franc, mais jamais démonstratif. « Je n’ai pas envie de faire du spectacle », glisse le chef, dans un sourire tranquille. Ce qu’il cherche, c’est l’émotion du goût, le souvenir éveillé, la matière sublimée.
Cette quête passe nécessairement par le produit, et c’est là que s’ancre l’autre facette du chef Viel : celle d’un passeur, d’un soutien actif à une nouvelle génération de producteurs. Il travaille main dans la main avec des maraîchers en permaculture, des cultivateurs de variétés anciennes de blé, ou encore de jeunes mytiliculteurs qui expérimentent des cultures en cave. Loin de se contenter de passer commande, il s’implique. Il visite, conseille, parfois même investit. Car pour lui, l’assiette commence bien avant les fourneaux : elle se joue dans les champs, les forêts, les ateliers agricoles, auprès de ces artisans qu’il considère comme ses égaux.
Le goût de la cohérence
Cette démarche, discrète mais tenace, est peut-être ce qui donne à sa cuisine une telle justesse. On y sent une cohérence, une éthique invisible mais omniprésente. À l’heure où la gastronomie est souvent tentée par l’esbroufe ou le concept, Arnaud Viel incarne une autre voie : celle de la fidélité au vivant, au rythme des saisons et des savoir-faire.
Avec le temps, La Renaissance est devenue bien plus qu’un restaurant gastronomique. C’est un lieu de rencontres, un point d’ancrage dans le tissu local, un poste d’observation sur ce que pourrait être la ruralité culinaire de demain : inventive, durable, fière sans arrogance. Arnaud Viel ne cherche pas les projecteurs, mais ceux qui s’assoient à sa table repartent avec le sentiment d’avoir goûté à quelque chose de rare : une authenticité sans nostalgie, une modernité sans rupture.
Dans l’Orne, il pleut souvent, mais il y a des soleils intérieurs qui réchauffent les paysages. Arnaud Viel en fait partie.
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